Mon père m’a toujours soutenue dans mon désir d’apprendre le piano. Et je lui en suis infiniment reconnaissante. C’est lui qui m’a transmis sa passion pour le piano.
Il raconte que, dès que j’ai su marcher, je cherchais à escalader le tabouret pour atteindre le clavier. J’imagine bien la scène…
J’étais fascinée par cet instrument…
Mon père m’a transmis tout ce qu’il connaissait de cet univers.
Lui qui avait perdu ses parents alors qu’il n’avait que 12 ans, il se sentait investi d’une mission. Celle d’apprendre à jouer, coûte que coûte.
Eh oui, leur piano, c’était tout ce qu’il avait gardé d’eux en souvenir…
Ses parents étaient tous deux musiciens. Il avait forcément la fibre musicale.
Et en effet, il n’a pas eu besoin de prendre des cours. Il a appris tout seul, en autodidacte. Et c’est ainsi que le piano est entré dans sa vie.
Grâce à la musique, il continuait de garder le lien avec ses parents. Il m’avait confié, plus tard, que c’était un moyen pour lui de communiquer avec eux, et de faire perdurer leur relation.
Moi, je comprenais tout à fait ce qu’il me racontait.
Et quand je racontais mes histoires à table, mes frères et sœurs jacassaient, me riaient au nez. Je m’en souviens comme si c’était hier… Mes parents leur disaient de se taire et d’écouter mes belles histoires.
Je sais que ce n’était pas méchant venant de leur part. Ils ont toujours été bienveillants envers moi. C’est juste que l’on ne se comprenait pas toujours. Eux étaient plus « terre à terre ». Je ne leur en ai jamais voulu.
Je crois qu’au contraire, j’aimais être la petite rêveuse, l’artiste de la famille. Mon rôle était de les divertir. De les amuser. Grâce aux histoires que je racontais, j’arrivais à capter l’attention. Et ce n’était pas rien, pour moi !
Il y a les histoires que l’on se raconte : Fictives, fantasmagoriques.
Et puis il y a les histoires vraies ; celle que je vous raconte aujourd’hui.
J’ai toujours le piano de mon père. Si je vous disais qu’il date de 1920. Vous ne me croiriez pas ! Et pourtant, il est toujours là, au milieu du salon. Oui, bien sûr, je l’ai fait réparer. Mais c’est bien lui qui m’accompagne. Tous les jours.
Il n’y a pas un jour où je m’en sépare. Et quand je pars en vacances ?
D’accord… C’est le seul moment où il n’est pas là. Mais cela ne dure jamais très longtemps ! Et puis, comme on dit, les retrouvailles sont merveilleuses.
On se manque.
C’est comme s’il faisait partie intégrante de moi. Comme s’il était « humain ». Je ne le vois pas comme un objet. Il me parle. On communique.
Mon mari, parfois, se montre un brin jaloux de ma relation avec lui. Et nous en rions tous les deux.
C’est un lien inextricable et inexplicable.
C’est comme le peintre avec son pinceau, sa toile et ses tubes de peinture…